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Le Z’har, dans le jardin des plumes

Tradition bien établie dans notre pays, la production artisanale du Z’har ou eau de fleur d’oranger  continue de faire l’objet d’un intérêt particulier au sein de bon nombre de familles tunisiennes et se déroule dans une ambiance festive. Dans plusieurs régions, y compris au Cap Bon on l’appelle Zah’r.

C’est que ce liquide fait encore partie intégrante des provisions de consommation courante des Tunisiens (O’oula ou provisions de bouche).  Aromate produit localement, liquide aux mille et une utilisations appréciées, il possède aussi des vertus médicinales et rafraîchissantes.

Il fait aussi partie de l’art de vivre tunisien. Rares en effet les Tunisiens qui n’ajoutent pas quelques gouttes de ce liquide à leur tasse de café turc, ou ne se voient  pas  aspergés de ce liquide quasi-sacré, lors de la cérémonie de la conclusion d’un contrat de mariage (Z’harr  veut dire aussi, chance, en arabe tunisien).

Il s’agit plutôt de l’eau de fleurs fraîches du bigaradier (Citrus Bigaradia) hydrolat obtenu après une légère distillation, généralement artisanale grâce à un alambic (mot d’origine arabe : Al Inbiq). Poussée, la distillation donnera le Néroli dit vrai, une huile essentielle, « variété dite Bouquetier de Nice. Le Néroli Portugal est celui de la distillation des fleurs d’oranger à fruits doux » (Voir : L. Guillochon : Traité d’horticulture pour le nord de l’Afrique. 4e éd.Tunis, 1931. P.544)

« C’est une activité très ancienne qui a fait acquérir à la Tunisie une grande notoriété internationale au fil du temps (…) et qui continue d’être pratiquée dans les règles de l’art et de donner des produits de qualité(…) surtout à Sfax ».

C’est ce qu’a écrit, pour sa part, Mohamed Ben Othmen El Hachaïchi, dans son ouvrage, en arabe sur les traditions tunisiennes,  écrit vers la fin du XIXe siècle (p. 131. Cérès : Tunis, 1994), en parlant de l’extraction, chez nous,  des eaux florales (d’oranger, de roses, de géranium, d’églantier, de jasmin, de menthe, etc.)   

Et l’auteur de préciser que la Tunisie exportait de grandes quantités de ces produits de valeur ainsi que les huiles essentielles extraites de ces mêmes fleurs et qui entrent dans la composition des parfums. Une activité florissante qui, selon lui, a reçu un coup dur à la suite de la propagation de l’utilisation de l’eau de Cologne.

« (…) les vertus du zhar par exemple sont exaltées de génération en génération. A-t-on le vertige ? Vite une petite gorgée de zhar pour se remettre d’aplomb ! », a écrit si Chedly Ben Abdallah sur les colonnes de votre journal « La Presse », il y a un quart de siècle (Voici des fleurs, des fleurs et des fleurs : 23 mai 1994.

Et notre chroniqueur et écrivain, dont nous saluons ici la mémoire, de poursuivre : « Souffre-t-on d’un début d’insolation à la suite d’une longue exposition au soleil, sur la plage ? Vite une abondante friction de zhar sur le sommet du crâne pour que le malaise disparaisse aussitôt ! (…)

L’auteur consacre aussi de longs paragraphes aux activités d’extraction et aussi pour décrire comment l’on sert un bon café turc fumant  en lui ajoutant quelques gouttes de zhar, ce qui ne manque pas de nous rappeler la fameuse chanson de Jammoussi,  « Kahwaji ! » (Cafetier).

Par Foued ALLANI

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